Repris de Parlons NATURE, édition de décembre 2021
Bonjour à tous !
Voici finalement le grand retour de votre cher bulletin Parlons NATURE !
Après quelques mois d’absence à avancer divers projets 4-H (ce n’est jamais le travail qui manque ici !), je vous reviens avec un sujet inspiré d’un de ces projets.
Et si l’on parlait un peu d’éveil à la nature ?
« On protège ce que l’on aime »
S’il y a une phrase parfaite pour illustrer à la fois le concept de l’éveil à la nature que son objectif, c’est bien celle-ci : « On protège ce que l’on aime, et on aime ce que l’on connaît ».
C’est bien logique, car comment peut-on aimer et se mobiliser pour quelque chose que l’on ne connaît pas ?
De manière générale, l’éveil à la nature est simplement le fait de créer un contact entre l’enfant et la nature pour que peu à peu, il développe un sentiment d’appartenance envers cette dernière.
Pourquoi veut-on que l’enfant connecte avec la nature ? Tout d’abord, le temps passé en milieu naturel apporte une foule de bienfaits sur la santé mentale, le développement moteur, les habiletés sociales et la gestion des émotions chez les enfants, petits et grands !
Cela dit, il y a plus que ces bienfaits pour l’individu, il y a aussi les bienfaits pour l’environnement, et c’est cet aspect que je désire aborder aujourd’hui.
Pour moi qui suis biologiste, mon intérêt à rapprocher les jeunes de la nature est clair : les enfants qui auront appris jeunes à aimer la nature seront plus enclins à poser des gestes pour la protéger pendant le reste de leur vie.
En tant qu’adultes, nous faisons un tas de choix importants qui peuvent avoir de gros impacts environnementaux. On peut penser à nos moyens de transport, notre choix de carrière, le type d’habitation où nous souhaitons demeurer, la manière d’aménager notre terrain, la provenance des produits que nous consommons, nos passe-temps, etc. Si en étant enfants, nous avons grandi en contact avec la nature, l’attachement que nous avons créé envers elle influencera probablement les choix que l’on fait dans notre vie, ou du moins, nous aurons plus le réflexe d’évaluer l’impact environnemental de ces choix et d’envisager des options alternatives.
À titre d’exemple, je devais faire des retouches avec une peinture spéciale sur mon plancher de ciment, mais il ne m’en restait plus. Après avoir pesé le pour et le contre, j’ai opté pour corriger les défauts avec une peinture que j’avais déjà et un peu de vernis. Pourquoi en suis-je venue à cette solution ? Tout simplement parce que je ne pouvais pas me résoudre à acheter 3 litres de peinture pour ensuite en jeter littéralement 95 % du contenu (cette peinture ne se conserve pas). Ça vous semble hors sujet comme exemple ? Pourtant, ça ne l’est pas du tout. Je voulais justement utiliser une situation anodine pour démontrer la portée environnementale de ma réflexion. La solution s’est présentée d’elle-même comme une évidence, comme si c’était naturel pour moi de chercher à éviter le gaspillage de ressource. Et pour cause, car on m’a élevé proche de la nature et des valeurs environnementales.
Tant qu’à parler de matériaux de construction, parlons bois. Avez-vous remarqué que le style champêtre, qui utilise beaucoup de bois, est associé aux maisons en campagne (d’où le nom), alors que le style industriel, exploitant davantage le métal et le béton, est issu du milieu urbain ? Force est de constater que l’environnement dans lequel on vit influence même l’environnement intérieur qu’on recrée dans nos maisons. Je l’ai personnellement remarqué dans mon entourage : les citadins ont un faible pour les matériaux minéraux (béton, métal), alors que les gens plus proches de la nature se sentent souvent interpelés par le bois. Ce qui est intéressant ici, c’est que le bois est un matériau plus écologique que le métal (très exigeant en eau) ou le ciment (toxique), ne serait-ce que par le fait qu’il est renouvelable. Je laisse ça ici, à méditer…
Si je reviens aux choix que j’ai énumérés plus haut, il sera probablement plus facile de sensibiliser un adulte qui a grandi avec la nature à laisser les feuilles mortes sur son terrain, à faire du camping au Québec plutôt que de voyager dans un autre pays (c’est polluant, prendre l’avion…), à prendre le transport en commun plutôt que la voiture individuelle, à acheter local, etc., qu’à quelqu’un qui n’a pas d’intérêt envers la nature.
L'éveil à la nature, c’est faire naître une histoire d’amour entre un enfant et la vie sauvage qui l’entoure. L’éveil à la nature, c’est former de bons futurs écocitoyens.
Et pour mobiliser les gens à protéger et préserver la nature, il faut qu’ils y aient développé un attachement, et pour ça, il faut avant tout être en contact avec elle.
On protège ce que l’on aime, et on aime ce que l’on connaît.
Sauver la planète ?
Si le fait d’établir une connexion avec la nature permet de former de bons écocitoyens, cela ne veut pas dire qu’il faut se dépêcher de parler de notre planète malade aux enfants pour autant !
Les enfants, surtout les plus jeunes, ont assez peu d’impact sur les problèmes environnementaux et leurs solutions. Il ne sert à rien de mettre tout de suite le poids de la survie de la planète sur leurs épaules : on doit commencer par les y émerveiller pour qu’ils cheminent graduellement et finissent par atteindre le niveau d’engagement et de mobilisation qui nous intéresse. Les jeunes doivent tout d’abord être émerveillés par la nature pour devenir curieux, commencer à l’aimer, prendre conscience des enjeux et finalement poser des actions concrètes pour la protéger.
Si on brûle les étapes, on pourrait faire naître de l’écoanxiété chez les enfants que nous tentons de sensibiliser, ce qui n’est vraiment pas souhaitable. Une autre voie possible est, au contraire, de désensibiliser les enfants à la cause environnementale. S’ils se sentent impuissants, le mécanisme de désensibilisation pourrait se mettre en place chez eux pour les protéger de l’écoanxiété, sans même qu’ils en soient conscients. Allons-y lentement, mais sûrement.
Toutefois, n’allez pas croire qu’on ne peut pas déjà inculquer de bonnes habitudes chez les jeunes enfants ! C’est très sain de leur expliquer le tri des déchets et de les aider à le faire (faites-le sous forme de jeux : ils apprendront encore mieux !), de les habituer à évaluer les quantités dont ils ont besoin pour éviter le gaspillage, ou encore leur faire remarquer la présence de déchets dans la nature et les ramasser avec eux. Ce sont de petits apprentissages qu’on peut enseigner d’une manière ludique et qui préparent lentement les enfants à poser des gestes responsables envers la planète. <3
Pas besoin d’être un pro !
Lorsque je participe à des colloques ou des congrès et que je vais à la rencontre des éducatrices, des enseignantes et des autres intervenantes à l’enfance, un des freins qu’on me présente souvent dans l’éveil à la nature est le manque de connaissance en écologie.
Je vais l’écrire ici noir sur blanc : PAS BESOIN DE CONNAISSANCES ÉLABORÉES POUR ÉMERVEILLER LES ENFANTS À LA NATURE !
Comme j’ai expliqué plus haut, juste passer du temps en milieu naturel c’est suffisant ! L’immersion est un moyen très efficace de développer l’intérêt et la curiosité des jeunes envers la nature, ce qui finit par se traduire en attachement. On se remémore notre citation : « On protège ce que l’on aime, et on aime ce que l’on connaît ».
Vous avez tous des connaissances suffisantes pour faire naître l’intérêt et l’émerveillement pour la nature chez les enfants. Pouvoir reconnaître un arbre, une plante, un oiseau, une grenouille et un insecte est suffisant. Et même si vous vous trompez entre un insecte et un arachnide, ou entre une mousse et un lichen, peu importe : l’éveil à la nature a une fonction émotive et une fonction cognitive quant à la curiosité, mais pas forcément une fonction pédagogique. Bien sûr, on peut se poser des questions et faire des recherches avec les enfants, mais savoir les réponses à leur question n’est vraiment pas nécessaire. Je pourrais être audacieuse et avancer que c’est même plus ou moins souhaitable à un certain point, car il est préférable que les enfants développent le réflexe de se poser des questions, de formuler des hypothèses et de faire les recherches par eux-mêmes. Évitez de leur donner les réponses toutes cuites dans le bec !
Cela dit, puisque le savoir est une richesse et que je ne voudrais surtout pas freiner votre soif de connaissances, voici une liste assez exhaustive de références et d’autres ressources sur la biodiversité québécoise. Vous y trouverez une panoplie de guides d’identifications et de sites Internet, mais aussi des applications mobiles et des groupes Facebook. Bonne découverte !
L’éveil à la nature, concrètement
Bien que la théorie soit très importante pour comprendre les différents concepts, elle a bien moins de valeur si on ne peut pas la mettre en pratique.
Je vous ai donc énuméré quelques exemples d’activités d’éveil à la nature à réaliser avec les enfants. Il n’y a rien d’exhaustif dans cette liste, votre imagination est votre seule limite. Amusez-vous!
Disposer les feuilles d'automne en dégradé de couleur
Chercher des vers de terre
Faire des frottis d'écorce de différentes espèces d'arbres
Écouter les oiseaux chanter
Dénombrer les nids dans les arbres
Sentir le parfum de différentes fleurs
Observer le travail d'équipe d'une colonie de fourmis
Identifier les différents types de flocons de neige
Sauter comme un lapin
Trier des coquillages par catégorie de forme, de taille, de couleur
Chercher des empreintes d'animaux
Dessiner le ciel
Amener la nature à soi
Selon l’endroit où l’on vit ou notre emploi du temps, il peut être plus difficile de passer des moments quotidiens en milieu naturel. Toutefois, c’est possible de faire de l’éveil à la nature partout et en tout temps.
Tout d’abord, même si l’on n’est pas en pleine nature sauvage, il suffit de franchir une porte pour se retrouver dehors. L’environnement extérieur, même urbain, offre des opportunités de s’émerveiller sur la nature qui nous entoure. On peut toujours trouver quelques arbres, plantes ou insectes, même simplement en bordure de rue. De plus, plusieurs espèces d’oiseaux s’observent en ville, comme la corneille d’Amérique, le goéland à bec cerclé et le merle d’Amérique, pour ne nommer que ceux-ci. On peut aussi croiser des écureuils et des marmottes, et la nuit, des moufettes et des ratons laveurs.
Lorsqu’on pense à la nature, ce sont surtout la faune, la flore et les écosystèmes qui nous viennent en tête. N’oubliez pas que la nature, c’est bien plus que ça ! Le patrimoine naturel inclut aussi les conditions climatiques, la géologie, le monde minéral, l’eau et l’astronomie. Pas besoin d’être en forêt pour étudier la météo ou le ciel avec les jeunes. 😊
Vous pouvez également inviter la biodiversité chez vous en effectuant quelques aménagements (avec les enfants, bien sûr !), comme planter des végétaux indigènes et installer des mangeoires ou encore, construire des abris fauniques. Je ne m’y attarderai pas davantage, car j’ai déjà consacré un bulletin complet sur le sujet. Je vous invite à le consulter si vous voulez rendre plus naturel votre environnement extérieur :
Pour terminer, même entre quatre murs, on peut faire de l’éveil à la nature ! Que ce soit en faisant des expériences de sciences naturelles (faire pousser des plantes par exemple), en aménageant un « coin nature » avec des échantillons biologiques récoltés sur le terrain (feuilles, plumes, nids, etc.), en montant un vivarium ou en faisant des activités sur le thème de l’écologie, les enfants sauront être curieux et s’émerveiller. N’hésitez pas à rendre l’environnement intérieur le plus naturel possible : cela aidera à recréer une ambiance naturelle inspirante. Des meubles en bois, des plantes sur les murs, des sons de la nature, des huiles essentielles au parfum de conifères… usez de créativité !
La trousse nature : un outil de découverte
Il y a toute sorte d’équipement qui peut venir soutenir la découverte de la nature, comme du matériel d’observation, de mesure ou encore de capture. Je vous laisse quelques idées d’articles pertinents à intégrer à une « trousse nature », au cas où ce genre de projet vous intéresserait. 😊
Loupe : ThinkStock, D0 - Jumelles : Jacek Halicky, CC BY-SA 4.0 - Boîte-loupe : Batholith, D0
Filet à papillons : Kieran, CC BY-SA 3.0 - Boussole : ThinkStock © - Moulage d'empreintes : Jessica Bayard, D0
Girouette : Manfredrichter, D0 - Vivarium : Jessica Bayard, D0 - Affiche poissons du Québec : Gouvernement du Québec, D0
Créer des habitudes nature
Pour que l’enfant passe par toutes les étapes de la mobilisation, de l’émerveillement à l’engagement, il faut qu’il ait un contact répété avec la nature. C’est en parlant souvent de nature, en lui donnant de l’espace dans nos milieux de vie et en allant à sa rencontre que les enfants vont développer un sentiment d’appartenance envers elle, et s’y attacher. Tous les jours, la nature devrait faire partie de notre vie, d’une façon ou d’une autre.
Essayez de trouver au moins un moment chaque semaine pour aller prendre du bon temps dans un milieu naturel ou semi-naturel (comme un parc aménagé avec beaucoup d’arbres) avec les enfants. Non seulement, le contact avec la nature aura pour effet de les sensibiliser aux enjeux environnementaux, mais même si je n’ai pas abordé le sujet dans ce numéro, la nature apporte énormément de bienfaits sur le développement global des enfants. Et vous tirerez profit vous aussi des cadeaux que la nature a à vous offrir. <3
Ce sont sur ces paroles que termine ce bulletin !
J’espère que vous aurez apprécié ce numéro quelque peu différent, et que vous vous sentez plus outillés et inspirés pour laisser plus d'espace à la nature dans votre vie et celles des enfants de votre entourage.
N’oubliez pas de faire le plein de Vitamine Nature !
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